Charles Maurras    Martigues
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La boussole et la caisse à outils

En 2008, commentant dans "L'Action Française 2000" [1] l'ouvrage de correspondance entre Charles Maurras et Monseigneur Penon [2], Guillaume De Tanoüarn concluait ainsi :

"L'aujourd'hui de l'Action française"

"Alors ? Plus que jamais, pour échapper aux idées toutes faites, il faut relire Maurras dans le texte. Au lieu de nous proposer une idéologie fermée sur elle-même, il nous offre les outils qui lui ont servi pour créer sa liberté intérieure. La caisse à outils est loin d'être périmée. Encore faut-il qu'on ne craigne pas de manipuler les instruments qu'elle met à notre disposition. Être maurrassien aujourd'hui, ce n'est pas s'affubler de telle ou telle étiquette et s'en satisfaire, c'est savoir se servir de ces outils ! Au-delà des idéologies, les “hard” ou les “soft”, loin de tous les prêt-à-penser, une école d'Action française sera pour tous et chacun une école de la liberté personnelle, et pour la France un laboratoire fécond en découvertes, si elle entreprend de « travailler à bien penser ». Avec les instruments universels que forgea, dans les brumes parisiennes de la fin du XIXe siècle, un jeune Rastignac monté de sa Provence".

Je ne pense pas que Guillaume De Tanoüarn avait connaissance du texte de Gustave Thibon que nous avons cités ici, dans notre première page de présentation, texte fondateur de ce site [3] :

"[...] Mais vous savez bien qu'un héritage n'est pas un talisman ni une baguette magique : c'est un outil. Et un outil qu'il faut savoir manier et adapter en fonction du mouvement de la vie qui ramène toujours le semblable, jamais l'identique. Épouser la pensée d'un maître, cela veut dire s'unir à elle pour lui faire des enfants [...] La vraie fidélité est celle qui prolonge, qui corrige et qui dépasse [...]".

Ce texte avait été édité dans un périodique provençal, éphémère, à diffusion quasi-confidentielle, et ne semble pas (hélas) avoir beaucoup résonné aux oreilles des responsables parisiens de l'Action française reconstruite. Je ne l'ai vu cité nulle part avant que nous le ré-publions. Mais la lecture de ces deux textes nous démontre, s'il en était besoin, que même à plus de 50 ans d'écart, deux esprits (très) supérieurs peuvent se rencontrer.

Dans un texte plus récent, recension du "Qui suis-je ?" de Tony Kunter sur Maurras [4], le même Guillaume de Tanoüarn parlait de la "pensée matricielle maurrassienne" [5], en définissant ensuite les cinq piliers :

"Elle [la pensée maurrassienne] offre une architecture mentale - la fabbrica della mente dont parle Vico - qui reste plus que jamais d'actualité. Peu de penseurs peuvent se vanter d'avoir construit une pensée « matricielle ». Michel Foucault avait bien vu la spécificité de ce type de pensée et de ce type de penseur, qui ouvrent un champ, dans lequel d'autres pensées que les leurs, et d'autres penseurs, peuvent s'ébattre à leur aise. François Huguenin avait bien vu cela lorsqu'il a employé le terme d' « école » d'Action Française [6]. Cette pensée matricielle a ceci de particulier - il faut l'ajouter - que ce n'est pas un système, comme il y a un système marxiste ou un système libéral, au sein duquel on retrouve un certain nombre d'étapes obligées qu'il faut avoir franchies pour que le parcours soit complet. Les décisions qu'a prises le jeune Maurras et qui lui survivent, en formant une matrice intellectuelle, sont avant tout des décisions critiques et limitatrices, non des décisions dogmatiques. Au premier rang de ces décisions, il y a la méthode maurrassienne : une ouverture universelle à tous les faits, « du moment qu'ils sont bien observés ». Les pensées viennent toujours des faits et non les faits des pensées. Voilà l'empirisme, toujours inaugural dans une pensée « maurrassienne »".

Dans la page inaugurale de ce site, introduite par le texte capital de Gustave Thibon (cité ci-dessus), nous parlions de "boussole maurrassienne", indispensable accessoire d'orientation, qui manque cruellement à beaucoup, même s'ils sont animés des meilleurs intentions. Guillaume de Tanoüarn parle de "caisse à outils".

Mais une boussole ne présente d'intérêt que si on sait l'utiliser et distinguer les trois 'Nord' d'une carte [7], sinon, on s'égare. Une caisse à outils ne présente d'intérêt que si on l'ouvre afin de se saisir des outils dont on connaît l'usage, sinon, on se blesse. Donc, avant tout, il faut lire, relire, travailler et méditer les trois textes cités ci-dessus : "L'aujourd'hui de l'Action française" dépend de leur compréhension. Puis étudier les maîtres et témoins de nos vies : Maurras, bien évidemment, mais aussi Daudet, Bainville, Massis, Bernanos, Boutang, Thibon, et bien d'autres... Enfin, solidement armé (sur le plan intellectuel s'entend ! Nous ne traitons ici que du "bon livre"), on pourra dispenser des soins à tous les désorientés de France, de Navarre et d'ailleurs. Qu'ils cessent de s'agiter pour agir [8].

Ajoutant notre pierre à l'édifice, nous publions aujourd'hui la page "Préfaces" de la section "Charles Maurras. Son œuvre rééditée".

Vingt préfaces ou postfaces sont disponibles (sur un peu plus de quatre-vingt préfaces rédigées). Certaines sont capitales, d'autres ont moindre portée, écrite plus par estime pour l'auteur de l'ouvrage que pour l'intérêt du dit ouvrage. Mais aucun écrit de Maurras n'est banal. Tous permettent d'éclairer une nouvelle facette d'un personnage qui reste encore à découvrir.

Peut-on imaginer un ouvrage regroupant, présentées et annotées, les plus importantes de ces préfaces ?

Bonne lecture.


Brian McLeóghann.

Le 18 mai 2013.

[1] R.P. Guillaume de Tanoüarn, Maurras : Une pensée, une école, une aventure, dans "L'Action Française 2000" (03-16 janvier 2008). Repris dans le dossier "Maurras" du site "Vouloir" (4° texte du dossier). retour au texte ]

[2] Dieu et le Roi. Correspondance entre Charles Maurras et Mgr Penon, 1883-1928. Toulouse, Privat, 2007. In-8°, 752 pages. retour au texte ]

[3] Gustave Thibon, Lettre sur les conditions d'une renaissance, dans "L'Action Ouvrière Française", juin 1955. Voir dans notre première page de présentation : "Maurras actuel ?". retour au texte ]

[4] Tony Kunter, Charles Maurras. Grez-sur-Loing, Pardès (collection "Qui suis-je ?" ), 2011. In-8°, 128 pages. retour au texte ]

[5] Guillaume De Tanoüarn, dans "L'Action française 2000" (05-18 janvier 2012). Réédition numérique dans le blog "Tony Kunter.fr", texte repris par "Les Vergers sur la Mer", après fermeture du blog de Tony Kunter. retour au texte ]

[6] François Huguenin, L'Action française. Une histoire intellectuelle. Paris, Perrin (Tempus), 2011. In-12, 686 pages. Réédition, revue et augmentée, en format poche, de À l'école de l'Action française : un siècle de vie intellectuelle", Paris, J.-C. Lattès, 1998. In-8°, 638 pages. retour au texte ]

[7] René Rémond distinguait trois "droites" dans la vie politique française... retour au texte ]

[8] Certains, espérant un "printemps français" spontané et radical, semblent ne pas avoir apprécié le pessimisme affiché dans notre dernière page de présentation "Une bonne canne, un bon livre". Je souhaiterais me tromper. Mais... retour au texte ]



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